Tu es Petrus

À la vérité, les hérétiques déforment ce texte par des tours de passe-passe. D’abord, ils ne veulent pas voir Pierre dans la pierre. Ils n’admettent pas non plus qu’à Pierre aient été concédées des clefs. Ils ne parviennent pas non plus à se persuader que ces métaphores se rapportent au pouvoir ecclésiastique suprême. Il nous faudra donc poser quatre questions.
La première : Pierre est-il la pierre sur laquelle est fondée l’Église ?
La seconde : être le fondement signifie-t-il être le gouverneur de toute l’Église ?
La troisième : Pierre est-il celui à qui les clefs ont été données ?
La quatrième : entendons-nous par clefs le plein pouvoir de gouverner l’Église ?

À la première question on donne quatre réponses différentes. La première, celle des catholiques : cette pierre est Pierre, i.e. celui qui s’appelait Pierre. Ce n’est pas à une personne qu’il a été donné, mais au pasteur et à la tête de l’église. La deuxième est celle d’Érasme (et d’Origène): tout homme fidèle est une pierre. La troisième est de Calvin (livre 4, institutions chap 6, verset 6) : cette pierre est le Christ. La quatrième, celle de Luther (livre du pouvoir du pape) et des centuriates (livre 1, centurie 1, chap 4, col 175, et le livre 1 smalchaldici, du primat du pape) : la pierre dont parle le Seigneur est la foi, ou la confession de la foi.

La première réponse, qui est la seule vraie, s’explique par le texte lui-même. Quand le Seigneur dit cette pierre là, il indique une pierre dont il avait parlé un peu auparavant. Il venait de donner à Simon le nom de Pierre, cephas, en syrien. Saint Jérôme (chapitre 2 aux Galates) enseigne qu’en langue syriaque, cephas veut dire pierre. Et à chaque fois qu’en hébreu on a pierre, on a cephas en syriaque. Le Seigneur a donc dit : « tu es une pierre, et sur cette pierre-là je bâtirai mon église ». Il est évident que ce « cette » ne peut se rapporter qu’à Pierre, qui venait d’être appelé ainsi. Et pourquoi le traducteur latin n’-a-t-il pas écrit : tu es une pierre et sur cette pierre là ? C’est parce qu’il a suivi le texte grec. Il ne l’a pas traduit du syriaque, mais du grec, où nous lisons : « tu es Pierre, et sur cette pierre j’édifierai mon Église ». Pourquoi le traducteur grec n’a-t-il pas dit : tu es une pierre, et sur cette pierre-là ? La raison en est que, comme petros et petra signifient tous deux pierre, il a semblé plus convenable de donner à un homme un nom masculin. Ensuite, pour expliquer la métaphore, il n’a pas voulu dire « sur ton Pierre », --ce qui pouvait être ambigu--mais sur ta pierre, mot qui ne signifie rien d’autre que pierre.

Venons-en au consensus ecclésial des pères grecs et latins. Tout le concile de Chalcédoine formé de 630 pères (actes 3) a appelé Pierre la tête et le fondement de toute l’Église. De même, on chante, dans l’Église, à tous les jours par la bouche d’un grand nombre, et on les chante depuis 1200 ans ces vers de saint Ambroise dans l’hymne des laudes du dimanche : « Quand le coq chanta, la pierre de l’Église confessa sa faute ». Saint Augustin le témoigne aussi (livre 1 retract, chap 21). Déjà à son époque ont avait commencé à chanter dans l’Église les vers de saint Ambroise professant que saint Pierre était la pierre sur laquelle il a édifié son Église.

Les Pères grecs maintenant. Origène (homélie 5 sur l’exode) : « Vois pourquoi le Seigneur a dit : hommes de peu de foi, pourquoi doutez-vous ? C’est parce qu’il est grand le fondement de l’Église, et solide la pierre sur laquelle il a fondé son Église. » Saint Athanase, dans son épitre à Félix, écrite par lui en son nom et au nom du synode d’Alexandrie : « Tu es une pierre, dit-il, et c’est sur ton fondement que les colonnes de l’Église, les évêques, sont confirmées. » Saint Athanase fait donc du pape le fondement sur lequel s’appuient les évêques pour être des colonnes de tout l’édifice. Saint Basile (livre 2, contre Eunome), dit : « Pierre, à cause de l’excellence de sa foi, a reçu en lui-même l’édification de l’Église. » Saint Grégoire de Naziance (dans la modération à conserver dans les débats oratoires) : « Pierre est appelé pierre, et c’est à lui qu’ont été confiés les fondements de l’Église. » Épiphane (dans ancor), dit : « Le Seigneur a constitué Pierre le premier des apôtres, une pierre solide, sur laquelle il a édifié son Église ».

Saint Jean Chrysostome (homélie 5 sur Mat) : « Le Seigneur a dit : tu es une pierre, et c’est sur toi que j’édifierai mon Église. » Et dans l’homélie 4 (sur le chapitre 6 d’Isaïe) : « Pourquoi saint Pierre est-il le fondement de l’Église ? Il aimait intensément le Christ; il ne connaissait pas l’art oratoire, mais triomphait des rhéteurs; il était un ignorant qui fermait la bouche aux philosophes; et il a dissout la sagesse des grecs avec rien d’autre qu’une toile d’araignées, lui qui a jeté son filet dans la mer, et qui a attrapé l’univers. » Saint Cyrille (livre 2, chapitre 12, sur saint Jean) : « Il lui a prédit que son nom ne serait pas Simon mais Pierre. Signifiant par ce mot imagé que c’est sur lui, comme sur une pierre très ferme, qu’il édifierait son Église ». Psellus (chapitre 4 du cantique des cantiques) : « Ses jambes sont comme des colonnes de marbre. Entends par jambes Pierre, le prince des apôtres, sur lequel, dans l’évangile, le Seigneur avait promis d’édifier son Église ». Nous avons les notes de Psellus sur les commentaires de Théodoret sur les cantiques des cantiques, de Théophylacte (Luc, chap 22) : « Après moi, tu es la pierre de l’Église, et son fondement ». Euthymius (cap 16, Matt) : « Je te placerai comme le fondement des croyants, j’édifierai sur toi mon Église ».
Parmi les latins, Tertullien (livre de la prescription, chap 22) écrit : « A-t-il manqué quelque chose à Pierre pour qu’on l’appelle la pierre sur laquelle serait édifiée l’Église ? » Saint Cyprien dans son épitre à Quintus : « Pierre est celui que le Seigneur a élu pour être le premier, et c’est sur lui qu’il a édifié son Église ». Il répète souvent des choses semblables. Saint Hilaire (Mt 16) : « Ô heureux fondement de l’Église, par la réception d’un nouveau nom ! Ô pierre digne d’édifier l’Église, pierre qui abolira les lois de l’enfer ! Ô bienheureux portier du ciel ! » Mais Érasme annota, là, en marge : « le fondement est la foi de l’Église ». Comme si c’était le nom de la foi qu’on avait changé, et non celui de Simon ! Et comme si c’était la foi qui était le portier du ciel ! Et que de dire de ce que saint Hilaire n’ait même pas prononcé une seule fois le mot foi ? Saint Ambroise (sermon 47) : « Pour la solidité de la dévotion des églises il est appelé pierre, comme le Seigneur a dit : Tu es Pierre. Car, par pierre, on exprime ce qui a été placé comme fondement au tout début de la foi; et c’est cette pierre immobile qui contient toute la masse de toute l’œuvre chrétienne ». Saint Jérôme (Mt 16) : « Selon la métaphore de la pierre, c’est à bon droit qu’on lui a dit : j’édifierai sur toi mon Église. » Et dans sa lettre au pape Damase sur le mot hypostase, parlant du siège de Pierre : « Je sais que c’est sur cette pierre qu’a été édifiée l’Église. » Saint Augustin (dans les psaumes, contre le parti de Donat) : « Énumérez les prêtres à partir de ce siège de Pierre : c’est elle la pierre que ne vainquent pas les portes orgueilleuses de l’enfer. » Notez que ce que ces saints appellent pierre ce n’est pas tellement la personne de saint Pierre que son siège. C’est sur ce siège qu’est fondée l’Église, et c’est contre lui que ne prévaudront pas les portes de l’enfer, car Pierre est la pierre non en tant qu’homme particulier, mais en tant que pontife.

Le même saint Augustin (sermon 15 sur les saints) dit : « Le Seigneur a donc nommé Pierre le fondement de l’Église, sur lequel s’édifie l’édifice ecclésiastique. » Maxime (sermon 1 sur les saints Pierre et Paul) écrit : « Par le Christ Pierre a été fait une pierre, quand il lui a dit : Tu es la pierre etc. » Saint Paulin (épitre 4 à Sévère) : « C’est le Christ qui est la pierre, mais il n’a pas refusé à son disciple la prérogative de ce nom quand il lui a dit : et sur cette pierre etc. » Saint Léon le grand (sermon 2, de l’anniversaire de son sacre) : « Demeure donc la disposition de la Vérité, et persévérant dans la fermeté de la pierre qu’il a reçue, saint Pierre n’a pas abandonné le gouvernement de l’Église qu’il avait assumé. Il est placé avant tous les autres, car, en le disant pierre on déclare qu’il est le fondement, et qu’il est le portier du royaume des cieux. C’est par le mystère de ces noms (pierre, clef) que nous apprenons ce qu’est l’association toute particulière de Pierre avec Jésus ». Saint Grégoire le grand (livre 6, épitre 37 à Euloge) enseigne : « Qui ne sait que la sainte Église est fermement fondée sur la solidité du prince des apôtres ? »

Tous ces extraits nous font voir l’impudence des hérétiques. Car Calvin dit, à l’endroit cité, qu’il ne veut pas présenter de témoignages des pères, non parce qu’il ne le pourrait pas, mais parce qu’il ne veut pas ennuyer ses lecteurs en cherchant à démontrer quelque chose de si évident. Au sujet de ce passage de saint Matthieu, Érasme s’étonne qu’il y ait eu des gens qui aient détourné ce texte pour le rapporter à l’église romaine. Il devra pardonner à saint Cyprien et saint Jérôme, comme s’il s’agissait d’un paradoxe inouï, pour avoir dit que l’Église était fondée sur Pierre. Surtout parce que c’est ce que tous les pères enseignent, et le plus grand nombre des théologiens et des canonistes récents, sans compter les anciens pontifes : Clément, Anaclet, Marcel, Pie, Jules, et d’autres que j’ai omis, pour faire bref, et aussi parce que nos adversaires ne les acceptent pas.

Venons-en donc à la deuxième opinion qui est celle d’Érasme. Il prouve que, par le mot pierre, on doit entendre tous les fidèles en citant Origène (traité 1, Mt) : « Est pierre tout imitateur du Christ, et c’est sur une pierre de cette sorte que l’Église est fondée. C’est dans chacun des parfaits qui témoignent par les paroles et les œuvres et la compréhension du sens des Écritures, qu’est édifiée l’Église, sur laquelle les portes de l’enfer ne prévaudront point. » Mais Origène donne de ce texte une interprétation non littérale, mais allégorique. Dans le lieu cité, il en a pourtant donné une interprétation littérale. Car, pour qui a le sens commun, ce passage ne peut pas signifier littéralement tous les fidèles, puisque le Seigneur ne parle qu’à Pierre, Et cela, il le montre de plusieurs façons. Il l’appelle Simon, qui était le prénom que ses parents lui avaient donné, et ajoute même le nom de son père, l’appelant fils de Jonas, pour le distinguer de Simon le zélote, et de Simon frère de Jacques et de Jude. Et ce n’est qu’après, qu’il ajoute le nom de Pierre qu’il lui donnait. Il s’est servi ensuite de pronoms qui désignent certaines personnes : moi et toi. S’il est donc permis de dire que ce texte ne se rapporte en rien à Pierre, il sera possible de détourner de leurs sens tous les textes de la Bible.

De plus, si tous les fidèles sont le fondement sur lequel est construite l’Église, tous seront donc un fondement. Si tous sont le fondement, où sont les murs, et le toit de cet édifice? Comme le dit saint Paul (1 Cor 12) : si tout le corps est un œil, où est l’oreille, où sont les autres membres? Ajoutons qu’au même endroit, le même Érasme juge absurde que l’édifice ecclésial soit fondé sur l’homme Pierre. Comment pourrait-il alors être édifié sur les autres hommes ? Ne sont-ils pas tous des hommes eux aussi ?

La troisième explication de ce texte de Matthieu 16 est de Jean Calvin, qui même s’il ne le dit pas en mots clairs, semble bien, par pierre, entendre le Christ. Car, sur quelle pierre est édifiée l’Église c’est, selon lui, une chose évidente puisque l’apôtre dit (Cor 3) : « Personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé : le Christ Jésus ». Il cite aussi saint Augustin (traité ultime sur saint Jean) qui dit : « Sur cette pierre que tu as confessée j’édifierai mon Église ». Le sermon 13 sur la parole de Dieu dit la même chose, et (dans le livre de ses rétractations, chapitre 21), il rétracte ce qu’il avait dit avant sur Pierre comme fondement de l’Église, et enseigne que c’est plutôt sur le Christ qu’elle a été fondée, et que c’est ainsi qu’il faut comprendre ce texte de Matthieu.

Personne ne doute que le Christ soit la pierre, et le premier fondement de l’Église. Et ce passage-là le démontre également, car si Pierre est fondement de l’Église en remplacement du Christ, le Christ l’est beaucoup plus. Mais, néanmoins, le sens propre, obvie, immédiat et littéral est que l’Église est édifiée sur Pierre. Ce que nous prouverons sans répéter ce qui a déjà été dit. D’abord le mot « cette » ne peut pas se rapporter à la pierre Christ, mais à la pierre qu’est Pierre. Car ce démonstratif doit indiquer une chose rapprochée, non une chose éloignée. Or le mot qui venait d’être prononcé n’était pas Christ, mais Pierre. Ensuite, bien que l’on puisse appeler le Christ pierre, ce n’est pas le nom que lui donne saint Pierre en le confessant, mais Christ Fils du Dieu vivant. Ce « cette » doit donc être référé à celui qui est appelé pierre, et non à celui qui ne reçoit pas ce nom. De plus, si le Christ était la pierre, comment aurait-il pu dire : « Je te dis que tu es pierre ». Il aurait parlé pour ne rien dire, à moins que les paroles qu’il prononçait ne s’adressassent pas vraiment à Pierre. Ensuite, si ces paroles s’appliquaient au Christ, il n’aurait pas dit j’édifierai, mais j’édifie mon Église, car il avait déjà édifié en lui les apôtres et beaucoup d’autres. Il dit j’édifierai, car Pierre n’avait pas encore été institué fondement de l’Église. C’est après la résurrection qu’il le deviendrait.

À l’argument de Calvin je réponds que saint Paul ne parle pas de n’importe lequel fondement, mais du fondement premier. Autrement il se contredirait lui-même puisqu’il a dit (Ép 2) : « surédifié sur le fondement des apôtres et des prophètes. » Il contredirait aussi saint Jean qui, dans l’Apocalypse, décrit les douze fondements de l’Église du Christ, et explique que ces fondements sont les apôtres. Pour saint Augustin, je dis qu’il ne réprouve pas notre sentence, mais qu’il donne la priorité à une autre. Car, voici ce qu’il dit dans les rétractations (1, chap 21) : « J’ai dit, en un certain endroit, au sujet de l’apôtre Pierre, que c’était sur lui comme sur une pierre qu’était fondée l’Église, ce qui est chanté par les bouches d’un grand nombre dans les vers de saint Ambroise, où, il dit en parlant d’un coq : « pendant qu’il chantait, la pierre de l’Église a effacé sa faute ». Mais je sais que très souvent après, j’ai expliqué que par « sur celui-ci » il fallait entendre celui que confessait Pierre. Car, il ne lui a pas été dit : tu es la pierre, mais tu es Pierre, car la pierre était le Christ. Je laisse au lecteur le soin de choisir quelle est la plus probable des deux explications. » Voilà donc quelle est son opinion, Il ne pense donc pas, comme Calvin, que ce soit un blasphème de déclarer que l’Église ait été édifiée sur Pierre.

J’ajoute que saint Augustin a été trompé par sa seule ignorance de la langue hébraïque. Car, son argument tient tout entier là-dessus : il n’a pas été appelé pierre mais Pierre. Il a pensé que la pierre sur laquelle était construite l’Église n’était pas Pierre, parce qu’il croyait que cephas ne signifiait pas pierre, mais un dérivé de la pierre, comme le mot chrétien ne signifie pas le Christ, mais quelqu’un qui est en lien avec le Christ. Donc, parce que l’Église doit être fondée sur une pierre et non sur un dérivé de la pierre, saint Augustin a pensé que cette pierre ne signifiait pas pierre mais le Christ. Mais, s’il s’était rendu compte que le mot cephas ne signifie rien d’autre que pierre, et que ce que le Seigneur a dit c’est : « tu es une pierre et sur cette pierre », il n’aurait eu aucun doute sur la vérité de notre opinion.

Il reste la quatrième, qui est celle de presque tous les luthériens, et qui semble pouvoir être confirmée par des témoignages d’anciens pères. Hilaire (livre 6, de la trinité) : « C’est sur la pierre de cette confession que s’édifie l’Église ». De même : « Cette foi de l’Église est le fondement. C’est par cette foi que sont rendues faibles les portes de l’enfer. C’est cette foi qui a les clefs du royaume céleste ». Saint Ambroise (livre 6, chap 9 sur Luc) : « Le fondement de l’Église est la foi ». De la même façon (livre 4, de la trinité), saint Cyrille : «Je pense que, par pierre, il n’a pas nommé autre chose que la foi inébranlable et très ferme du disciple ». Ilirycus ajoute : « Si l’Église était fondée sur Pierre et non pas plutôt sur la profession de foi, elle se corromprait bientôt, car Pierre a cherché à détourner le Christ de sa passion. En effet, en Matthieu, on lit : « Va derrière moi, Satan, car tu ne comprends pas les choses de Dieu ! » Ensuite, il a renié trois fois le Christ, et non sans serment (Mt 26).

Je réponds qu’on peut considérer la foi ou la confession de deux façons. La première façon : absolument, telle qu’elle est en elle-même, sans relation à la personne de Pierre. La seconde : en relation à la personne de Pierre. C’est de la première façon que les adversaires voudraient que la foi soit le fondement de l’Église. Mais ils se trompent surement, car s’il en était ainsi, le Seigneur n’aurait pas dit : sur cette pierre j’édifierai, mais j’édifie ou j’ai édifié mon Église. Car, plusieurs avaient déjà cru qu’il était le Fils du Dieu vivant, comme les bergers, la sainte Vierge, saint Siméon, Zacharie, saint Jean Baptiste, les apôtres et les autres disciples. De plus, la foi au sens strict est correctement appelée le fondement de la justification et de toutes les vertus, comme le dit saint Augustin (sermon de la parole apostolique) : « La maison de Dieu est fondée en croyant, elle est érigée en espérant, et elle se parfait en aimant ». Mais la foi n’est pas le fondement premier de l’Église, car les fondements doivent être de même nature qu’elle. Or l’Église est une assemblée d’hommes qui sont comme des pierres vivantes, comme le dit 1 P 2. La pierre qui est le fondement doit donc être un homme, non une vertu.
Ensuite ce « cette » montre clairement qu’on ne peut, par pierre, entendre la foi, car ce mot se réfère au mot pierre qui vient juste d’être prononcé. C’est à Simon qu’il a été dit « tu es la pierre », non à la foi. Il faut donc entendre la foi de la deuxième façon, et dire qu’il ne s’agit pas ici de la foi en général ou de n’importe qui, mais de la foi de celui qui est le fondement, la foi de Pierre, non en tant qu’homme privé, mais en tant que pasteur. Cela se rapporte donc à ce que nous avons expliqué jusqu’ici, au sujet du fondement de l’Église. Car, on dit que c’est la foi de Pierre qui est le fondement de l’Église, pour deux raisons. D’abord parce que c’est en récompense de sa foi qu’il est advenu à Pierre d’être le fondement de l’Église, comme l’expliquent saint Jérôme, saint Hilaire, saint Jean Chrysostome, et d’autres commentateurs de ce passage. Ensuite, il est le fondement très solide de l’Église du fait que sa foi ne peut errer, et qu’il doit confirmer et soutenir la foi des autres. Car, c’est ce que le Seigneur lui a dit en Luc (22) : « J’ai prié pour toi, pour que ne défaille pas ta foi. Et quand, tu seras revenu à toi, confirme tes frères ».

Donc, dire que, à cause de sa foi indéfectible, Pierre est la pierre très solide qui soutient toute l’Église, c’est dire que c’est sur cette pierre et sur cette foi que l’Église a été fondée. Et c’est ainsi que l’ont compris les pères cités. Car, saint Hilaire, après avoir dit, à l’endroit déjà cité, que la foi de Pierre est le fondement de l’Église, et qu’il avait reçu les clefs du ciel, ajoute, au sujet de ce même Pierre : « C’est un lieu suréminent qu’il a mérité par la bienheureuse profession de sa foi ». Et un peu après : « C’est à cause d’elle qu’il a les clefs du royaume du ciel, que ses jugements terrestres sont célestes ». Donc, comme il avait dit que c’est la foi qui est le fondement et qui a les clefs, il dit maintenant que c’est à cause de sa foi que Pierre a mérité un lieu suréminent, c’est-à-dire être la tête ou le fondement, et avoir les clefs. Et lui-même, dans Mt 16, dit clairement de saint Pierre : « Sois heureux d’être devenu le fondement de l’Église par la réception d’un nouveau nom ! »

Pour une raison semblable, saint Ambroise (saint Luc, livre 6, chapitre 9) enseigne que c’est la foi de Pierre qui est le fondement de l’Église. Il dit au même endroit : « Il n’a pas nié à son disciple la grâce de ce mot, à savoir, qu’il soit lui-même un Pierre, quelqu’un qui, de la pierre, a la solidité de la constance et la fermeté de la foi ». Saint Jean Chrysostome, dans les deux textes cités, expliquant ce que c’est qu’édifier l’Église sur la confession de Pierre, nous présente un Seigneur qui parle ainsi : « Moi, c’est sur toi que j’édifierai mon Église ». Enfin, saint Cyrille, même dans le lieu cité, ne dit pas que c’est la foi de n’importe qui, qui est le fondement de l’Église, mais celle de Pierre. Et (au livre 2, chapitre 12 de saint Jean), il écrit Pierre est la pierre sur laquelle l’Église a été fondée.
Et à l’objection d’Illyricus, je réponds d’abord avec saint Jérôme, dans son commentaire de ce chapitre. Quand il entendit Jésus lui dire : « arrière Satan », et quand il le renia trois fois, Pierre n’était pas encore le fondement. Car, dans ce passage, Jésus lui promit que c’est après sa résurrection qu’il lui donnerait de l’être. J’ajoute que saint Pierre n’a pas erré dans la foi, mais qu’il n’a fait qu’ignorer quelque chose quand il entendit : « arrière Satan » ! Et quand il l’a renié, il a péché contre la charité, non contre la foi. Nous traiterons ce sujet explicitement dans le traité de l’Église. Saint Robert Bellarmin Les Controverses de la Foi Chrétienne contre les Hérétiques de ce Temps Disputationes de controversiis christiniæ fidei adversus hujus temporis hæreticos. TROISIÈME CONTROVERSE GÉNÉRALE LE SOUVERAIN PONTIFE CHAPITRE 10
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Arthur De la Baure
La conclusion est nette, soit François est le Vicaire du Christ et les traditionalistes sont dans l'erreur. Soit les traditionalistes ont raisons et François n'est pas le Vicaire du Christ. La solution Gallicane n'en est pas une.
Arthur De la Baure
Abbé Jean-Baptiste Aubry, Docteur en Théologie, dans son livre "Études sur Dieu, L'Église, Le Pape et sur le Surnaturel":
"Le gallicanisme d'abord consiste à nier ou à déprimer plus ou moins l'autorité du pape. Or, cette autorité est le centre même et le fondement de celle de l'Église ; par conséquent, elle renversée, celle de l'Église finira par crouler aussi. Ils n'osent pas dire qu'on peut …Plus
Abbé Jean-Baptiste Aubry, Docteur en Théologie, dans son livre "Études sur Dieu, L'Église, Le Pape et sur le Surnaturel":

"Le gallicanisme d'abord consiste à nier ou à déprimer plus ou moins l'autorité du pape. Or, cette autorité est le centre même et le fondement de celle de l'Église ; par conséquent, elle renversée, celle de l'Église finira par crouler aussi. Ils n'osent pas dire qu'on peut penser autrement que le pape. Or, nous savons que la pensée du pape, c'est la pensée de l'Église ; si on pense autrement que lui, on pense autrement qu'elle, si on s'écarte de lui, on s'écarte d'elle, car Ubi Petrus, ibi Ecclesia.
[...] J'ose dire que peu d'intelligences, en France, ont compris à fond deux choses souveraines dans le gallicanisme : son principe, et son effet le plus étendu."